20 octobre 2017

Flat tax et PFU : de quoi parle-t-on ?



Le vote d’un prélèvement unique (PFU) de 30 % sur les revenus du capital le 18 octobre dernier a suscité de vifs débats à l’Assemblée nationale. Ce mode de prélèvement se fonde sur le concept théorique de la “flat tax”, modèle de prélèvement obligatoire discuté de longue date par les économistes. Mais quel est l'intérêt d’un tel impôt ? En quoi le PFU se rapproche t-il de ce modèle ? Un détour par la théorie économique semble nécessaire pour apprécier la pertinence d’une telle mesure.  

Le concept de “flat tax”.

La “flat tax” ou ‘impôt linéaire” désigne un impôt forfaitaire unique sur la liquidité, caractérisé par un taux bas et une assiette large. L'archétype de ce type d'impôt en France est la taxe sur la valeur ajouté (TVA).

D’après la théorie économique, la flat tax consiste à remplacer l'impôt progressif sur le revenu par un impôt sur la liquidité ou la consommation, afin d’éviter de taxer à deux reprises le revenu (une première fois lorsque celui-ci est gagné, puis lorsqu’il rapporte des intérêts). Il s’agit ainsi de ne taxer qu’une fois les revenus, et ce, à taux unique. Pour garder une forme de progressivité de l'impôt, ce système de taxation prévoit une exemption pour les bas revenus ainsi que des mécanismes de déductions, notamment concernant les dépenses sociales.

Ce mode d'imposition est conçu dans le but d’éviter une taxation des revenus d’épargne et afin de favoriser la formation de capital. Il est donc particulièrement intéressant du point de vue du lissage de la consommation et de l’investissement. Il repose en outre sur le présupposé que les taux d’impositions sont des incitants très puissants, orientant le comportements des agents économiques.

Le prélèvement unique sur le capital (PFU).

Du point de vue de la théorie économique, l’imposition du capital est justifiée, elle permet non seulement d’assurer une part de redistribution mais aussi d'alléger la fiscalité qui pèse sur le travail.

La fiscalité du capital en France est caractérisée par un taux d’imposition marginal particulièrement élevé pouvant aller jusqu'à 60%, l’un des plus importants des pays de l’OCDE, mais surtout par une extrême hétérogénéité.

Les revenus du capital sont soumis à une double imposition, avec d’une part l'impôt sur le revenu (en fonction d’un barème progressif allant jusqu'à 45%) et de l’autre les cotisations sociales (à un taux de 15,5%).

Or, cette hétérogénéité caractéristique du système fiscal français peut nuire à la bonne allocation des ressources dans l’économie ainsi qu’à la lisibilité globale du système.

Le gouvernement a ainsi décidé de mettre fin à cette double imposition en créant un prélèvement forfaitaire unique sur les revenus mobiliers à hauteur de 30%. En réalité, il s’agit de la somme des cotisations sociales d’un montant de 17,2%, suite à la hausse de la CSG, et du taux forfaitaire d'impôt sur le revenu de 12,8%. Le livret A, le PEA et la majeure partie des contrats d’assurances vies ne sont pas concernés. En outre, le PFU est optionnel mais il s’agira désormais du mode de prélèvement par défaut.

D’après Bercy, loin d'engendrer des économies pour les finances publiques en raison de la baisse du taux d’imposition, cette mesure coûtera 1,3 milliard d’euros en 2018 et 1,9 milliard en 2019. Quel est donc l'intérêt d’une telle mesure dans un contexte de réduction des dépenses publiques ?

Un pari risqué mais cohérent du point de vue de la théorie économique.

La principale vertu de ce nouveau mode d’imposition réside dans sa simplicité et sa lisibilité pour le contribuable. L'hétérogénéité des taux et des assiettes est en effet particulièrement préjudiciable en ce qu’elle affecte les décisions et peut instaurer un climat d’incertitude. Baisser le taux marginal d'imposition des revenus du capital permettrait en outre d’augmenter l’attractivité pour les investissements internationaux et domestiques. En instaurant ce nouveau mode de prélèvement, le gouvernement fait donc le pari de changer les comportements des épargnants afin d’orienter le capital vers l'investissement productif.

L’instauration d’un tel mode de prélèvement ne constitue pas une révolution fiscale en soi. Néanmoins, elle représente une baisse significative de la fiscalité pour ceux qui payent beaucoup d'impôts sur le capital. La baisse du taux et la simplification du système auront de fait un effet psychologique - et financier - très positif pour les détenteurs de revenus du capital. En revanche, rien ne garantit que les investisseurs se saisissent de cette baisse d’imposition pour effectivement investir dans le capital productif.

En outre, il est évident que cette mesure affecte la redistributivité du système fiscal. Si elle augmente, d’une part, la lisibilité globale, elle peut également créer un sentiment d’inéquité pour les revenus les plus faibles.



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